2014 « Lecture du paysage… »

Sortie pérégrine : « Lecture du paysage en Gâtine poitevine. Paysages identitaires et permanence des formes »

animé par Jean-Pierre Camuzard

Journée pérégrine  du samedi 17 Mai 2014

Lecture du paysage en Gâtine poitevine

Note de présentation par Jean-Pierre Camuzard

I. Thème général : paysages identitaires et permanence des formes en Gâtine poitevine

« Le paysage est un espace temps, le temps historique dans lequel l’homme s’est approprié l’espace, a fait de la géographie son histoire. » (Fortier-Kriegel 2002)

II. Objectifs :

Général. Un paysage peut faire l’objet d’une approche semblable à celle d’un texte : lire, c’est au delà des mots et de leur signification, trouver un sens global qui sera fonction de la culture de chacun. Un paysage « se lit » aussi comme un texte, globalement, en mobilisant ses acquis culturels.

Spécifique (pour la SH2PG) : découverte des éléments signifiants du paysage, c’est-à-dire de ses composantes physiques, mais aussi des éléments immatériels, historiques et ethnologiques qui sont à l’origine de sa formation et lui confèrent son  identité.

Opérationnels : une « traversée » du paysage, une pérégrination sur les traces des hommes qui ont construit notre environnement, de Parthenay à Exireuil, en marquant les étapes détaillées ci-après, sachant que chacune pourra être l’objet de plusieurs points d’observation.

III. Itinéraire et principales étapes (voir carte générale du circuit)

Lieu de rassemblement : le carrefour de la Petite Meilleraye, route de Parthenay à Saint-Maixent, sur le parking de l’ancienne station des tramways des Deux-Sèvres. Présentation de la journée et définition de ce que l’on entend par « éléments signifiant du paysage ».

Etape 1. Les paysages granitiques de la Meilleraye (La Bigorlière et environnement proche), métairie, étang, domaines du duc de la Meilleraye.

Etape 2. Les paysages du Terrier du Fouilloux, site préhistorique et historique, lecture du paysage à partir du belvédère. Sites de la Vergne observé depuis la route,  puis le Grand Fouilloux, le belvédère du Terrier et le camp romain des Châtelliers (camp des Forts).

Etape 3. Les paysages hérités de l’époque médiévale : la Guillotière, les bois de l’Abbesse, le territoire des potiers.

Etape 4. Les rochers de Moulin Neuf près de Ménigoute et repas à Bois Pouvreau. Intervention sollicitée de Nicolas Gamache, chercheur universitaire, sur le thème du « paysage qui vote« .

Etape 5. Le paysage des abbayes : les Châtelliers et Saint-Giraud (aspects ethnologiques).

Etape 6. Les paysages géologiques : Exireuil et le Graben de Saint-Maixent,  limite méridionale de la Gâtine poitevine.

IV. Les trois dimensions  du paysage

La dimension géologique

Le paysage que nous projetons de traverser, a pour socle géologique le vaste dôme granitique qui s’établit de Bressuire jusqu’au delà de Ménigoute, mais dont nous ne considèrerons que sa partie méridionale, de Parthenay à Exireuil.

A l’est, vers les plaines calcaires du Haut-Poitou, donc le bassin versant de la Loire, c’est la marge orientale de Gâtine soulignée par la faille de Bressuire-Vasles, qui a contrôlé l’ancien cours du fleuve Yprésis dont on peut suivre les traces (cf. sablière de Saurais). C’est aussi une bande forestière importante (Pressigny, Autun, La Ferrière, Bois du Roux, Magot…) qui se poursuit par la forêt de Vouillé près de Poitiers et au delà la forêt de Moulière.

A l’ouest, vers le bassin versant de la Sèvre niortaise, c’est la Gâtine occidentale, le socle primaire, volcanique et métamorphique, surmonté de formations sédimentaires du Jurassique inférieur (Lias) et de formations résiduelles superficielles du Tertiaire et du Quaternaire.

 

La dimension historique

Le paysage s’est constitué, tel que nous le connaissons aujourd’hui, d’abord dès le Moyen Âge sous l’influence de petits seigneurs et surtout du fait de l’implantation des grandes abbayes (dont les Châtelliers, Saint-Maixent et Sainte-Croix de Poitiers). Les racines du paysage datent de cette époque, différents documents extraits des cartulaires et des archives de la Barre en témoignent. Dans un deuxième temps, ces paysages ont été restructurés à la Renaissance (dès le XVe siècle). Bien que ce phénomène soit plus important et surtout mieux caractérisé en Gâtine septentrionale, il est toutefois admis, depuis les remarquables études du docteur Merle, qu’un vaste remembrement, effectué par les petits seigneurs terriens désireux de restructurer leurs finages suite aux désordres de la guerre de cent ans, ait affecté l’ensemble de la Gâtine. Matérialiser les limites des terres devenait une nécessité et la haie fut l’outil naturel qui le permit. Parallèlement le sol offrit des conditions naturelles favorables à l’installation du bocage. Il fallut aussi des tenanciers dociles ou intéressés par les fonctions de la haie, qui participent ainsi à son entretien. Il fallut enfin une volonté sociale affirmée, celle de construire un nouveau paysage certes par nécessité économique, mais aussi par identification culturelle à un patrimoine foncier dont l’appropriation, au niveau des exploitants des nouvelles tenures, n’était pas seulement matérielle, mais aussi morale (appartenance à une communauté). Intérieurs et extérieurs, les paysages « fondent l’identité de chacun » (Auricoste, 2001). Force est donc de prendre en compte les dimensions ethno écologique et surtout ethno symbolique déterminantes de la construction et de l’évolution du paysage identitaire de Gâtine poitevine.

La dimension ethno symbolique (et identitaire)

Le paysage lui-même, en tant qu’objet (i.e. matérialité objective), en tant que mode d’occupation et d’appropriation de l’espace est l’effet d’une culture, par essence mouvante, c’est-à-dire l’effet des mentalités successives des habitants, celui des civilisations et de leur relation à la nature, l’empreinte du passé : « Une civilisation, c’est tout d’abord un espace« . (Braudel).

Cependant, « le paysage ne se confond pas davantage avec l’espace qui nous entoure que l’histoire ne se confond avec le temps qui passe », (Michel Conan). Le paysage est hérité de l’espace en tant que lieu de conflit entre nature et société, mais il est aussi rapport culturel au monde.

C’est ce que nous essaierons de montrer, au travers de la visite des sites programmés.